Muselière

La muselière, objet de torture?

Lorsque l'on entend le mot muselière ou lorsque l'on voit une muselière sur un chien, on a vite tendance à faire un raccourci et poser une étiquette de "chien méchant". Je me suis toujours dit, je n'ai pas de chiens réactifs, donc pas besoin. Jusqu'à présent, je n'ai personnellement jamais eu besoin d'habituer mes chiens à la muselière. 

Grande erreur de ma part!

 

Pourquoi? 

 

Plusieurs fois, avec mon beauceron, nous avons dû, nous rendre en urgence (coupures des coussinets, griffes arrachées ou autres blessures). Je vous laisse imaginer les douleurs! Avec un chien de 43kg, mon véto aurait bien été content de lui mettre la muselière, afin de rassurer tout le monde. Même si, tout s'est bien passé sans...

 

Pour le prochain voyage, pendant que je préparais l'itinéraire et que je me renseignais au sujet des lois locales, je remarque que depuis 2018, les chiens doivent porter la muselière sur un trajet en bateau. Gros dilemme!!! C'était notre but final du voyage afin de voir ces fjords allemands!!!! Mon mari refuse de mettre la muselière à nos chiens et moi, grosse envie d'y aller tout de même. 

 

J'étais vraiment partagée entre les besoins de mes chiens et les miens, surtout que c'était juste pour 2h, sur une semaine de voyage.

 

De plus, ce sujet revient de manière récurrente pour les thérapies comportementales. Et c'est toujours le point sensible pour tout le monde: mon chien n'est pas méchant! Donc à chaque fois, des réticences pour que le client habitue son chien à cet objet de malheur (oui, je parle bien d'habituation). Je ne vais pas rentrer sur le  fait que cela ne s'arrête pas juste au chien qui est méchant/gentil et qu'il faut tenir compte de bien d'autres critères. C'est un peu réducteur pour le travail avec le chien.

 

Vous l’aurez compris, que votre chien soit agressif ou non, le port de la muselière pourra toujours être présent dans la vie d’un chien, pour diverses raisons : pour sa santé, pour sa sécurité ou celle des personnes/chiens qui croiseront votre chemin ou tout simplement pour respecter la loi. Je vais donc m'en arrêter au chien non- réactif qui a besoin du port de la muselière dans la vie de tous les jours.

 

Du coup, je me rends au magasin pour avoir le temps de les préparer à cet objet de toutes les convoitises. ;-)
Et là, une fois arrivée à la caisse, gros moment de solitude. Mais qu'est-ce que la vendeuse va bien penser??? Surtout, que j'en achète deux (xs et une xl)!!!

Là, je me dis que pour les gens, effectivement, ce n'est pas évident de faire ce travail sur soi. Le chien, lui, il s'en fout du jugement des autres en face, mais pas la personne au bout de la laisse... :-/ Là aussi, vaste sujet de discussion...;-) Du coup, je paie rapidement pour m'en aller au plus vite et mon seul but, est que les chiens voient cet objet, comme un jouet de plus et y associe une émotion de joie et de fun à son apparition.

 

Et oui, encore faut-il qu’il assimile cet outil à quelque chose de positif, au même titre que la laisse, le harnais, la brosse, la dremel ou... Cela ne s'improvise pas et demande un tant soit peu de préparation. On ne travaille pas avec la contrainte, mais avec la participation volontaire du chien, dans la joie et la bonne humeur. C'est certain que c'est plus facile d'imposer et tant pis pour lui, c'est comme ça et pas autrement. Sauf que personnellement, je veux que mes chiens aient du plaisir à mes côtés et dans la vie de tous les jours. Ils n'ont pas choisi d'y être...


Et là, on en vient dans le vif du sujet du travail de conditionnement avec nos chiens. Comment fait-on?

 

Uniquement grâce au conditionnement classique:

Le conditionnement classique (aussi appelé conditionnement répondant, conditionnement de type I ou conditionnement pavlovien) est un concept du béhaviorisme proposé par Ivan Pavlov au début du xxe siècle. Cette théorie s'intéresse aux résultats d'un apprentissage dû à l'association entre des stimulis de l'environnement et les réactions automatiques de l'organisme. Cette notion de réaction non-volontaire est le principal point qui la différencie du conditionnement opérant. 

 

Pour faire simple, on associe un objet qui à la base est neutre pour le chien, pour y associer une émotion de plaisir. 

 

Les nombreuses études qui ont surgi en s’appuyant sur le conditionnement classique nous ont aidé à comprendre, en grande partie, de nombreux aspects de l’apprentissage humain. Grâce à lui, nous en savons plus sur l’apparition des phobies ou sur le lien entre des émotions et de nouveaux stimulus. Pavlov a donc permis de comprendre une grande partie de ce que nous savons aujourd'hui, à propos de l’apprentissage et du conditionnement. 

 

Et oui, les émotions ne sont pas que positives, d'où l'importance d'y associer les bonnes et d'être toujours vigilant aux émotions de son chien. Encore faut-il savoir quoi observer et avoir un tant soi peu d'empathie (là aussi, vaste sujet de discussion...). Comme exemple, je pense surtout à la socialisation des chiots. Car de mauvaises associations peuvent vite s'y greffer. Et ça se fait très vite, dans le bon ou le mauvais sens!!!

 

Ce processus de conditionnement arrive à chacun dans différents domaines et permet la mise en mémoire de nombreuses associations plus ou moins simple. La prise de drogue, qui s'accompagne généralement d'une sensation de bien-être, en est le parfait exemple : l'individu se sent mieux dès lors qu'il sait avoir son produit sous la main et être en mesure de l'utiliser quand il en a envie...

 

La publicité qu'on nous martèle à longueur de journée, utilise ce principe. 


Ci-dessous, les étapes pour y arriver. Mon but premier était que mon chiot de 4 mois soit raide dingue en voyant la muselière. Les étapes 1 et 2 se basent sur le conditionnement classique et ce sont les points que les gens bâclent, quand ils travaillent avec leur chien. Au contraire, c'est vraiment l'étape clé, à ne pas louper. Dans toutes ces étapes, vous remarquerez, que je n'appelle jamais le chien, ni le tire vers moi, ni le pousse dans la cage, ni ferme la cage sur lui, ni dire non... Le chien est libre de ses mouvements, je fais que valider. Plus il aura de contrôle sur ce qui se passe, plus le chien aura confiance.

 

Etape 1, 1ère semaine:

Prendre la muselière dans la main, dès que le chien la remarque en la regardant, prendre la nourriture et nourrir le chien avec quelque chose que le chien raffole. Le chien n'a pas besoin à cette étape de mettre le nez dans la muselière mais juste la toucher à l'extérieur ou la regarder et le chien est ensuite, longuement nourri avec votre tube ou avec des friandises, près de la muselière. 

On laisse le chien venir, c'est le chien qui touche, pas vous qui allez toucher le chien avec l'objet! Donc quand vous montrez l'objet, votre bras reste près de vous et ne s'approche pas du chien.

Plus la récompense sera de haute valeur, plus votre association sera forte, stable et puissante. Donc laisser vos friandises basiques, au placard. Cette fois on sort la grosse artillerie. Pour ma part, pâté de foie ou fromage.

A faire 3x dans la semaine, 2x par jour. L'exercice prend 15 secondes.

Et bien faire dans l'ordre: on prend la muselière, le chien la regarde ou il vient la toucher dessus, ensuite, on nourrit le chien et on cache la muselière dans son dos. Ensuite on recommence: on montre la muselière,....

Une fois les répétitions terminées, on range tout le matériel. On ne laisse pas visible la muselière à portée du chien traînée sur un meuble!

 

Etape 2, 2ème semaine:

Prendre la muselière dans la main, lui montrer, prendre le tube et l'insérer à travers le grillage de la muselière et laisser le chien insérer son museau, pour venir lécher le tube. Votre main reste statique, vous laissez le chien s'approcher, ce n'est pas votre main qui va au museau du chien, mais bien le chien, qui vient contre la muselière.

 

Etape intermédiaire, check:

Je voulais juste voir la réaction du chien quand il m'entend manipuler la muselière. La vidéo parle d'elle-même. On voit le chien qui se précipite vers moi, limite, je démonte la table basse au passage et se jette dans la muselière. Voilà, le but est atteint! Et c'est le but à atteindre, avec tout ce que vous faites avec votre chien. La réaction doit être la même, quand vous sortez votre harnais, la caisse de transport, la brosse......

A la fin de la vidéo, on voit l'étape 2 (tube à travers la muselière).

 

Etape 3, 3ème semaine:

Là, on passe à ce qu'on appelle du conditionnement opérant. C'est-à-dire que je vais récompenser uniquement le comportement que je désire et est observable par moi. Là, mon critère est que le chien insère son museau de lui-même et touche le fond de la muselière, sans que le tube y soit. La récompense vient donc après que le chien ait montré le comportement. Si le conditionnement classique est efficace comme sur la vidéo précédente. Je peux passer de suite à cliquer le chien qui insère son museau, car le chien le fait automatiquement.

 

A cette étape, j'utilise un marqueur vocal ou clicker, pour indiquer le comportement que je souhaite.

 

Etape 4, fin de la 3ème semaine:

idem que ci-dessus, mais je mets ce comportement sous signal.... Par exemple: "dedans"!

 

Etape 5, dès la 4ème semaine:

idem que ci-dessus, mais je travaille sur la durée, dans d'autres endroits, fermer les lanières, attendre le signal de libération (libre, ok,...). Toujours de manière progressive. Je ne vais pas m'y attarder, car le but était de vous montrer les toutes premières étapes.

 


Les rappels d'urgence au sifflet, la cage de transport, le harnais, la brosse, le sèche cheveux.... Travaillés de la même manière.


Si on ne prépare pas le chien, bienvenue aux problèmes. Combien prennent des cours privés pour régler des soucis de peurs liées au harnais? Le chien ne veut plus rentrer dans sa cage et mord le propriétaire car il le contraint? Des chiens infernaux aux manipulations..... La liste est longue.

 

Alors qu'il faut juste prendre quelques minutes pour montrer au chien et prendre le temps de travailler progressivement, tenir compte de ses émotions et travailler dans le respect, dès le départ et ne pas attendre que le mal soit fait.

 

Et garder ces associations positives se travaille à vie! Et oui, cela demande du temps et de l'implication de la part des propriétaires. Les apprentissages à mettre en place sont énormes pour un chiot. 

 

Pour le choix du matériel: Muselière Baskerville, qui permet de haleter, boire et manger quand le chien la porte.

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Commentaires: 1
  • #1

    Michèle Ciboulette (vendredi, 27 juillet 2018 21:36)

    Super et complet ton article. Je peux te le piquer pour mes clients? Bises et peut être une fois en août pour SP à Versoix avec Esthe et cie �

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